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Le Vexin-Thelle, qu’ont raconté à plusieurs reprises les différentes expositions de l’association « Le Pétillon », était, comme toutes les régions rurales d’autrefois, un « pays » où la population vivait en grande partie en autar­cie, une autarcie qui perdura fort longtemps dans certains domaines. « A la ferme Deneux, à Bachaumont, nous n’avions pas l’eau courante. Il fallait descendre à la source qui se trouvait tout en bas de la côte, près du pont, en face de l’étang. J’y allais parfois avec un tombereau. Pour remonter l’eau, c’était plus facile ! », se souvient M. Bernard Monnier. Toutefois le Vexin s’ouvrit de plus en plus sur le monde extérieur. Le processus passa, bien sûr, par le développement d’une agriculture compétitive, il passa aussi par l’existence d’entreprises dont nous allons découvrir  les diverses vocations au fil des époques.

Des services de proximité
Jadis, faute de transports, il fallait trouver sur place tout ce qui était nécessaire au fonctionnement de l’agriculture, activité essentielle de la population. Des carrières fournissaient les matériaux nécessaires à la construction des bâtiments, mais il y avait aussi pour cela les tuileries et les briqueteries, sans oublier les scieries pour le bois et les nombreux fours à chaux. M. Camille Pascaud en fut témoin : « Le four à chaux a encore fonctionné un peu avant que je n’arrive au Boulleaume. Il y avait une cheminée et on brûlait le calcaire extrait dans les fonds de Bachaumont, qu’ils remontaient avec des tombereaux. Les gens badigeonnaient leur intérieur à la chaux, avec un balai. ». Il fallait, toujours sur place, transformer les produits agricoles. De nombreux moulins à eau et quelques moulins à vent permettaient de moudre les grains mais fonctionnèrent aussi pour les produits issus de l’élevage, comme des laiteries et même des mégisseries. « Nous avons exploité une ferme de 50 hectares à Liancourt, à partir de 1950. Nous avions 16 vaches. C’était Pierre Ribeaucourt, de la laiterie de Chaumont, qui ramassait notre lait » (M. Guy Dupressoir). Puis vinrent les distilleries, les sucreries et enfin, plus tard, les coopératives agricoles. Ainsi donc existaient depuis bien longtemps de nombreuses entrepri­ses en lien direct avec l’agriculture. Elles furent dépen­dantes de l’énergie hydraulique ou bien eurent recours à la vapeur avant que n’apparaisse l’électricité.

Premières reconversions
Certaines de ces entreprises de proximité s’adaptèrent, d’autres cessèrent de fonctionner tout en trouvant des successeurs heureux de pouvoir occuper des sites propices à leurs productions. Ainsi apparut dans le Vexin une seconde génération d’activités. De nombreux producteurs de champignons de Paris investirent d’anciennes carriè­res. « A côté de chez nous, dans des anciennes carrières, ils ont produit des champignons mais aussi des endives» (Mme Monique Dupressoir). « Dans les petites carrières de Montagny, à un moment, ils ont fait des champignons. C’était la famille Rousseau. Ils n’étaient pas beaucoup à y travailler» (M. Maurice Brochard). Des moulins à eau se reconvertirent facilement car l’électricité n’était pas encore répandue et l’on avait besoin d’une source d’énergie. D’autres bâtiments désaffectés permirent aussi l’installation de nouvelles activités. «Les usines Schmitter étaient installées dans l’ancienne distillerie, à la sortie de Chaumont, près du pont de la Vierge. Après ils sont partis à Trie-Château. Lorsqu’ils travaillaient à la forge, on entendait la presse, surtout l’été, lorsque les fenêtres étaient ouvertes, ça cognait dur » (M. Jacques Guéry). Les nouvelles usines n’étaient donc plus liées à la vocation agricole du Vexin. De plus, la proximité de l’aggloméra­tion parisienne allait devenir la nouvelle donne…

Le temps des décentralisations
Déjà, au XIXe siècle, la proximité de Paris avait favorisé l’implantation de l’industrie du bouton et de la nacre dans la région de Méru. Lorsqu’arrivèrent les Trente Glorieuses, et même avant, bon nombre d’entrepri­ses parisiennes commencèrent à s’installer dans le Vexin-Thelle. Des initiatives heureuses si l’on en croit le témoignage de ceux qui découvraient que l’agriculture n’avait plus besoin d’eux. « Et puis sont arrivées les machines : arracheuses de bettera­ves, moissonneuses-batteuses. J’ai bien compris qu’il n’y avait plus de place pour moi dans les fermes» (M. Raymond Frétigny). Il faut d’ailleurs préciser que cette troisième génération d’entreprises, souvent prête à former elle-même ses salariés, était très gourmande en personnel. C’était le cas pour l’usine  Flexico-Minigrip d’Hénonville, spécialisée dans le conditionnement en plastique « : A mon embauche en 1975, nous étions au moins 130 personnes. Avant les premiers licenciements, en 2007/2008 nous étions presque 500» (Mme Françoise Maillard). Ainsi, la décentralisation parisienne créa par centaines de nouveaux emplois dans le Chaumontois comme dans le reste du Vexin.

Un travail de mémoire
Activités de proximité dans le monde rural tradition­nel, anciens sites reconvertis, et enfin usines décentrali­sées, telles sont les trois familles d’entreprises dont nous avons choisi de parler. Elles ont contribué à faire vivre nos villages du Vexin-Thelle et à les enrichir.
Nous souhaitons donc vous aider à mieux les connaî­tre. Nous avons pour cela présenté, un par un, la quasi-totalité des villages de la Communauté de Communes du Vexin-Thelle et bon nombre de communes des cantons voisins pour lesquelles nous avons recueilli documents écrits, photographies et témoignages. Vous constaterez que ceux-ci nous montrent combien, jusqu’à une époque encore récente, travail et habitat se trouvaient mêlés. Un équilibre aujourd’hui plus difficile à trouver, la nouvelle décentralisation parisienne, celle de l’habitat, ne rendant pas toujours faciles les rapports entre ceux qui entrepren­nent et travaillent sur place et ceux qui recherchent un logis reposant. Vous découvrirez aussi des aspects du paysage que vous n’aviez peut-être pas encore vus.

Les carrières
Le promeneur peut parfois être intrigué par la présen­ce, sur le plateau du Vexin, de ce qui ressemble à de grosses cheminées, comme c’est le cas, par exemple, entre Serans et Nucourt. Il s’agit des bouches d’aération des champignonnières qui furent longtemps exploitées dans d’anciennes carrières souterraines. Si la pierre à chaux était extraite à ciel ouvert, la pierre de construction fut, pendant des siècles, le plus souvent produite souter­rainement. Les carriers découpaient à la main de gros blocs de moellons que l’on déplaçait par roulement, des piliers de soutènement étant conservés à espaces réguliers. La qualité de la pierre pouvait varier, comme le raconte Roger Stoppe : «Quand j’ai construit ma maison, le patron, M. Radet, m’a prêté un tracteur et une remorque pour aller chercher les pierres aux carrières de Nucourt. Parfois le carrier, M. Libert, me disait de revenir une autre fois car il était sur un filon dont les pierres étaient trop tendres et ne feraient pas l’affaire. Ainsi, ma maison, que j’ai construite moi-même, est très solide». Des carrières à ciel ouvert ont aussi été exploitées, mais la nature reprend vite ses droits et elles sont souvent peu visibles en raison de la végétation. D’une manière générale, les carrières qui avaient été très actives au moment de la reconstruction d’après-guerre disparurent ensuite du Vexin, comme avaient déjà disparu l’extraction du gypse pour le plâtre et l’extraction de la pierre à chaux. Toutefois, en s’installant dans les anciennes carrières souterraines, les champignon­nistes contribuèrent à en entretenir la mémoire.

Les champignonnières
M. Jean Davesne évoquait les champignonnières de Chars, village véritablement truffé de carrières. « Les cultivateurs fournissaient le fumier de cheval et, en retour, récupéraient le fumier de champignons. Il y avait du craon, (de la pierre tendre) qui était broyée. J’ai vu les gars à genoux faire ça avec des meules. Le Père Danchez travaillait dans les champignonnières, je le revois avec sa carriole pleine de fumier. Après on a ajouté du fumier de mouton car il n’y avait plus de chevaux, puis il y a eu les engrais et ensuite on a fait des fumiers un peu synthéti­ques. Les champignons partaient sur Paris». Toutes les carrières souterraines de Chars n’abritèrent pas des champignonnières, d’autres devinrent des dépendances pour les maisons voisines, en particulier celles implantées à flanc de coteau. Le promeneur attentif peut encore en observer de nos jours.

Les industries de l’argile
La pierre des carrières ne suffisait pas à bâtir les maisons. De nombreuses petites unités de production de tuiles et de briques fonctionnèrent dans le Vexin-Thelle. Au milieu du XIXe siècle, Célestin Herest exploitait une briqueterie à Marines, au lieu-dit La Croisette, en bordure de la Nationale 15. Plusieurs villages, tel Fleury, ont des lieux-dits portant encore ce nom. Vers 1900, s’arrêta celle de M. Delafolie, à Eragny-sur-Epte, puis, quelques années plus tard, vint le tour de la tuilerie de la famille Cantin, à Montagny. Ce fut alors au nord du Vexin-Thelle qu’il fallut aller pour voir encore produire des matériaux à partir de l’argile et se développer deux entreprises importantes. Auneuil devint la capitale locale de la tuile mécanique qui, peu à peu, prit la place de la tuile plate, mais fut surtout  connu pour une spécialité : les produits céramiques, grès et carrelages. Mme Marie-Noëlle Thépaut en a gardé le souvenir d’une entreprise particuliè­rement attentive aux besoins de ses employés : « C’était Philippe Boulanger qui dirigeait l’affaire. La famille Boulanger avait racheté l’usine un peu avant la dernière guerre, c’était la Société Anonyme des Produits Céramiques d’Auneuil. Grâce à elle, nous partions en colonie de vacances et tout était organisé par le curé de La Houssoye aidé de sa sœur. Nous étions nombreux, il y avait deux cars. Tout était pris en charge, nos parents n’avaient qu’à nous fournir les vêtements. C’était dans les années 1960 ». Et M. Pierre Maillard de rajouter : « Pour les ouvriers, il y avait une journée de chasse organisée par Philippe Boulanger, à La Pampa. Il y avait de bons casse-croûte avec du beurre, et lorsqu’il en restait, Papa nous en rapportait, c’était un régal». Une entreprise familiale modèle qui laisse rêveur…

Bien d’autres fournisseurs
D’autres entreprises contribuaient à la vie matérielle des villages. Les charbonniers installés dans les bois de Villers-sur-Trie, par exemple, qui existaient encore au XIXe siècle, mais sur lesquels les témoignages sont inexistants et n’ont pas permis de rédiger une page consa­crée à ce village. Les scieries familiales, parfois installées dans d’anciens moulins où elles profitaient de la force hydraulique, permettaient de se servir systématiquement du bois de notre région. Comment aurait-on pu faire autrement alors que les transports étaient difficiles et coûteux, situation qui, d’ailleurs, avait aussi ses consé­quences sur la manière d’écouler la production des fermes. 

Laiteries et fromageries
Chaque ferme ayant des vaches, il fallait pouvoir en écouler le lait. Mme Geneviève Pascaud raconte : « Le lait était écrémé en suffisance pour le beurre. Pour le lait lui-même, on savait ce que les ouvriers voulaient et l’excédent, c’était pour le laitier qui passait. Dans un premier temps, ce fut la laiterie de Chaumont, puis, après, celle de Lyons-la-Forêt. Ensuite, quand on est passé à la trayeuse électrique, on avait un « tank » et alors là le lait était réfrigéré et le camion ne passait plus que tous les deux jours. On ne faisait pas de fromage frais. Les vachers m’apportaient plusieurs bidons et je faisais la distribution dans des boîtes qui étaient accrochées à l’extérieur. D’ailleurs il reste encore quelques crochets. Le beurre, c’était une fois par semaine. Avant moi, c’était Jeanne Le Duigou qui faisait la distribution. Qu’est-ce qu’elle travaillait ! ». La laiterie de Chaumont fut implan­tée à proximité de la gare des marchandises. Elle logeait une partie de son personnel : « Mes parents habitaient avec leurs quatre enfants dans les bâtiments au-dessus de la laiterie, où mon père travaillait. Il a d’abord ramassé le lait dans les fermes, puis il s’est occupé des « tanks » de lait qui partaient pour Paris. J’ai connu Marcel Dubuc, je prenais parfois mes douches à la laiterie, c’était lui qui me mettait l’eau chaude, il était très gentil » (M. André Zawol). Fleury possédait aussi une laiterie dont se souve­nait M. Jean James : « La laiterie et fromagerie de Fleury, dirigée par M. Robouame, employait une trentaine d’ouvriers en comptant ceux qui ramassaient le lait. Je me rappelle de certains d’entre eux : Micheline Lapierrala, Charles Dian, Pierre Thierry, Léon Daveluy. On y fabriquait un fromage, une sorte de Brie, avec une étoile dorée sur l’emballage». La quasi disparition des vaches dans notre région entraîna la mort de ces laiteries dont les bâtiments furent le plus souvent affectés à de nouvelles activités telle celle de Chaumont occupée depuis par un ferrailleur-brocanteur.

Sucreries et distilleries
Les betteraves sucrières sont un produit lourd et encombrant dont le transport a toujours posé problème. Mme Fernande Landry racontait : « Sur la ligne Méru-La Bosse, au moment des betteraves, il y avait plus de trains car certains cultivateurs allaient à la gare d’Heulecourt ou à celle de Fresnes déposer les betteraves qu’ils avaient chargées à la main en plaine. Ils les déchargeaient en tas, puis elles étaient ensuite rechargées, encore à la main, dans les wagons. Elles devaient aller à Méru ou à Bresles, à la sucrerie ». Les problèmes de transport étaient toute­fois simplifiés par la création sur place de nombreuses petites distilleries qui dépendaient le plus souvent d’une seule grosse ferme avant d’être, ensuite, gérées par des coopérateurs. «La distillerie avait été construite en 1893. Elle dépendait du domaine du Boulleaume, puis elle a été vendue et est devenue une coopérative alimentée depuis deux dépôts. Les coopérateurs situés à l’ouest, comme ceux d’Hadancourt ou même de Lattainville, déposaient leurs bette­raves à Branchu, les autres, comme ceux de Tourly, le faisaient près de la gare de Liancourt. Un petit train permettait d’amener les betteraves à la distillerie, ça allait plus vite que les attelées de bœufs et de chevaux ! La distillerie du Boulleaume était connue pour la qualité de sa production. L’alcool partait dans le Nord, chez Alissen, où il était transformé en produit comestible revendu même au comptoir des alcools et chez Pernod et Ricard ». (M. Camille Pascaud).

Un travail pénible
« Celui qui arrachait les betteraves devait les charger dans les tombereaux. En 1949, j’ai arraché pour Lebrun à Loconville. Lui avait deux camions GMC qui emportaient les betteraves à sa distillerie située sur la route de Liancourt. Il fallait alors lancer très haut les betteraves, à la main, pas avec des fourches. A cette époque, il ne fallait pas les piquer ni les casser». M. Jean Mallédant ne fit pas qu’arracher en plaine, il travailla aussi à l’intérieur d’une distillerie : « Au lavoir de la distillerie de Neuvillette, il y avait plein de courroies de transmission pour entraîner les moteurs. Une fois, j’ai voulu faire signe à un collègue et une agrafe s’est prise dans mon alliance, j’ai eu très mal et aussi très peur. La dernière campagne que j’ai faite, j’étais à la chaufferie, il y avait aussi Saint-Léger et Zuchuat. Je bourrais le charbon dans la chaudière. Ensuite il y a eu une trémie dans laquelle on le versait et, suivant la température qui était souhaitée, on avait un variateur de vitesse qui pouvait accélérer l’alimentation de la chaudière. J’ai fait ainsi quatre années complètes. En dehors de la saison, je participais à l’entretien. Nous étions alors six. J’ai construit les caniveaux de réserve avec le tunnel. Nous avons tout terrassé à la main, fabriqué le coffrage avant de couler le béton, là aussi un béton fait à la main».

Menaces  pour l’environnement ?
Mme Mireille Ramond se souvient : « C’était du temps de la distillerie, ça devait être Arcade Chéron qui s’en occupait, l’exploitant de la ferme de Laillerie. Tout le monde apportait les betteraves avec les chariots et les chevaux, ça grouillait de partout. Ils pompaient l’eau dans la Troësne ». Difficultés de transport mais aussi problè­mes de pollution, tel est le lot de ceux qui demeurent près des distilleries, lesquelles consomment de l’eau propre mais aussi rejettent des eaux usées. On lit donc dans les archives de nombreux dossiers concernant les précautions à prendre par les distillateurs pour ne pas polluer les rivières. Les réglementations finirent par être efficaces. Mais l’activité des distilleries pouvait parfois engendrer d’autres catastrophes, ainsi que le racontait de Mme Geneviève Pascaud : « Je me rappelle avoir traversé le pré avec Maman et les enfants du château pour aller voir l’incendie. Le chauffeur venait de charger la chaudière de la locomotive en charbon. La rame repartait vers Liancourt lorsqu’une escarbille s’échappa de la cheminée et mit le feu au hangardit des Quatorze travées, sous lequel était entreposée la nouvelle récolte de foin. Très vite le feu embrasa tout le bâtiment. C’était sous l’Occu­pation, en 1941 ou 42 ». Néanmoins, le petit train du Boulleaume laisse à Mme Pascaud un bon souvenir : « A chaque instant, le train passait devant la ferme. Il y avait de la vie, c’était agréable ».

Le travail à domicile
« Ma femme était championne au binage des betteraves, elle n’avait jamais mal aux reins. Qu’est-ce que je pouvais souffrir pour arriver à la suivre, elle faisait des longueurs sans jamais se relever, elle prenait mon rang au bout et elle venait à ma rencontre ». Ainsi parlait M. Bernard Monnier, admiratif de son épouse qui l’aidait à finir ses rangs. Mais les durs travaux agricoles saisonniers disparurent peu à peu et bon nombre de femmes se tournèrent vers la confection : « J’ai commencé à faire de la confection en 1957 pour Lamy-Kabrand, qui était à Paris avant de s’installer à Rueil-Malmaison. Nous avons fait des babouches pour l’Algérie mais surtout des pochet­tes de toilette. C’était essentiellement du travail de couture. Au début, j’allais tous les mardis porter mon travail, je prenais l’express du matin, à Chars, après avoir trait mes vaches. A partir de 1960, j’ai fait le dépôt pour les confectionneuses de toute la région et un camion apportait le travail à faire et remportait ce qui avait été fait». Ainsi parle Mme Odette Morin, qui centralisa pendant 28 ans le travail des confectionneuses qui furent jusqu’à 32, habitant le Vexin et même au-delà.
Le travail à domicile n’était pas une nouveauté. Mme Fernande Landry racontait déjà : « Maman encartait les boutons pour une entreprise d’Amblainville, nous, les gosses, on l’aidait à trier les boutons. Mme Sébastien, la femme du cantonnier, elle aussi à Fleury, en encartait pour une maison de Laboissière. » Même témoignage de M. Jean James : « Ma mère, à une période, encartait les boutons. Je me rappelle que l’on avait eu un hiver rude, elle se mettait près de la fenêtre pour travailler avec une couverture sur les genoux, et comme les vitres étaient pleines de givre, elle se servait d’un fer à repasser pour les dégivrer et pouvoir regarder dehors ». D’une manière générale, les recensements du début du XXe siècle montrent l’existence de nombreux travailleurs à domicile travaillant dans le domaine des boutons, de la tabletterie et de la brosserie, et souvent recensés comme étant à leur compte… L’ancêtre de l’auto-entreprise ?

La décentralisation
Puis vint le temps des nouvelles usines. Outre les emplois en nombre, elles apportaient aussi un perpétuel renouvellement des produits, des modes de production et donc du travail. Mme Françoise Maillard nous parla ainsi de Flexico Minigrip à Hénonville : «Au début, nous travaillions pour les entreprises d’habillement, nous produisions des emballages de chemises, de sous-vêtements, des emballages pour des maisons de grands couturiers. Vers 1980, fini les sacs, tout était présenté sur cintre dans les grandes entreprises de vêtements. Alors nous nous sommes tournés vers l’alimentaire : sacs de congélation, emballage des pains et brioches Pasquier, par exemple. Dans les années 1990, nous avons investi dans des machines, des broyeurs qui permettaient de récupérer les déchets et de les retraiter. Reconvertis en petites billes, ils pouvaient être à nouveau employés sur les chaînes. Nous nous sommes lancés aussi très tôt dans les sacs biodégradables. Dans l’alimentaire, c’est très compliqué car le sac doit pouvoir résister au froid du congélateur tout en étant biodégradable à l’air libre ». Ces nouvelles usines offraient aussi des emplois à ceux dont l’agriculture n’avait plus besoin et leur ouvraient aussi de nouveaux horizons : « Mon mari a été embauché à la Griffine en décembre 1958. Avant il travaillait dans les fermes. Chauffeur, il livrait les produits un peu partout en banlieue parisienne, dans toute la France et même en Italie. Il allait souvent aussi à l’aéroport, et aussi chercher des pièces d’outillage pour l’usine. Nous avons habité Hardeville, puis ensuite nous avons pu faire construire ». (Mme Colette Mabille). La présence de ces usines en plein essor entraînait des déplacements de personnel qui, pour se loger temporairement, avaient souvent recours à des pensions ou des hôtels. Ainsi Mme Germaine Schmidt, qui tenait alors le Bar de l’Etoile à Gisors, se souvient avoir hébergé et nourri de nombreuses personnes venant travailler à Sérifontaine.

Invitation à la randonnée
M. André Zawol explique : « Mon père, ouvrier de laiterie, faisait aussi le binage et l’arrachage des betteraves tandis que nous, les enfants, au sortir de l’école, nous allions ramasser les pommes de terre ». Le travail de la terre demandait alors beaucoup de monde. A son tour, M. Augustin Gasparik évoque ainsi « la Griffine des années 1970 où les heures supplémentaires, la semaine des 5 fois 8 (3 équipes sur 24 heures et 2 pour la fin de semaine) et l’arrivée de travailleurs portugais ou turcs suffisaient à peine à faire tourner l’usine pour répondre à la demande des clients. Dans les deux cas, un monde où chacun pouvait trouver sa place, gagner sa vie, souvent durement, mais être ainsi reconnu et respecté.
Prenons maintenant le chemin qui mène plus près des villages de cette terre laborieuse où, durant les décennies qui nous précèdent, les habitants ont travaillé et entrepris en fonction des réalités économiques des diverses époques. Bonne promenade pour encore mieux découvrir le Vexin et le Pays-de-Thelle d’hier, cette belle terre d’entreprises

Retrouvez l'exposition fête d'autrefois de ce livre
Exposition Terres d'entreprises dans le Vexin et le Pays de Thelle

 

Table des matières

Remerciements
Témoignages
Introduction

Les communes

Ableiges
Auneuil
Bachivillers
Boissy-l’Aillerie
Boissy-le-Bois
Boubiers
Bouconvillers
Boury-en-Vexin
Boutencourt
Bray-et-Lû
Brignancourt
Buhy
Chambors
Chars
Chaumont-en-Vexin
Chavençon
Courcelles-les-Gisors
Delincourt
Enencourt-Léage
Enencourt-le-Sec
Eragny-sur-Epte
Etrépagny
Fay-les-Etangs
Fleury
Fresneaux-Montchevreuil
Fresnes-l’Eguillon
Gisors
Gouzangrez
Hadancourt-le-Haut-Clocher
Haravilliers
Hardivillers-en-Vexin
Hodent
Houssoye (La)
Ivry-le-Temple
Jamericourt
Jouy-sous-Thelle
Lattainville
Lavilletertre
Liancourt-Saint-Pierre
Lierville
Loconville
Magny-en-Vexin
MarinesMéru
Mesnil-Théribus (Le)
Monneville
Montagny-en-Vexin
Montgeroult
Montjavoult
Monts
Neuilly-en-Vexin
Neuville-Bosc
Nucourt
Osny
Parnes
Pontoise
Porcheux
Pouilly
Puiseux-Pontoise
Reilly
Saint-Clair-sur-Epte
Saint-Gervais
Saint-Ouen-l’Aumône
Santeuil
Senots
Serans
Sérifontaine
Théméricourt
Thibivillers
Tourly
Trie-Château
Trie-la-Ville
Troussures
Us
Vallangoujard
Vaudancourt
Vaumain (Le)
Vigny

16 pages en couleur, non paginées, sont insérées entre les pages 144 et 145

Bibliographie et sources

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